Vous êtes amer, même en ayant donné le meilleur de vous-même, ça ne change rien. La première fois que vous réalisez ça, vous vous dites que c’est votre chef le problème. A la longue, l’expérience aidante, vous vous êtes fait à une triste réalité du monde de l’entreprise. Las, vous avez compris qu’il fallait mieux ne pas en faire plus que demandé car l’engagement est rarement reconnu à sa juste valeur et pis, les discours managériaux entretiennent un mythe : « le travail finit toujours par payer. » Bullshit !

Le gâchis de talent

Combien sont-ils à se reconnaitre dans ce discours ? Combien de personnes talentueuses ai-je eu l’occasion de rencontrer qui, d’une façon ou d’une autre, ont perdu la foi et me racontent la même histoire ? Ecœurées d’un système, bridées par leur management, passées parfois par le burn-out, le bore-out et toutes ces formes de désengagement. Elles partagent toutes une chose commune : la désillusion.

Il faut dire que l’entreprise sait parfaitement y faire. Marketing RH et autres communications sur la marque employeur donnent à penser que le monde de l’entreprise est le rêve de tout employé!

Seulement l’entreprise est une cellule sociale vivante dont l’organisation est aussi bonne que son maillon le plus faible.

La hiérarchiologie

Depuis plus de 40 ans, nous connaissons le principe empirique de Peter :

« Dans une hiérarchie, chaque employé tend à atteindre son niveau d’incompétence » Laurence J. Peter

Les managers sont au courant, les RHs aussi et pourtant, rien ne change: les hiérarchies sont malades et figent les forces créatrices des sociétés. Plus la structure est grande, plus les employés connaissent le nom de managers qui ne sont pas au niveau, qui retardent les projets, brassent de l’air voire nuisent franchement à la société L’efficience des entreprises en pâtit, les carrières et la motivation aussi. C’est une situation où personne ne gagne et le comble, c’est que la plupart du temps les incompétents sont promus et les autres rarement…

Le dessinateur de bandes dessinées Scott Adams a, de façon satirique, résumé ça sous les traits de son personne phare Dilbert:

« Les gens les moins compétents sont systématiquement affectés aux postes où ils risquent de causer le moins de dégâts : ceux de managers. » – Principe de Dilbert

Si vous êtes un talent dans une telle société, fuyez ! Car malgré les beaux discours, tout est mis en œuvre pour que vous restiez là où vous êtes, sans considération de votre potentiel. Par définition, une personne talentueuse est compétente dans son poste, pourquoi la faire changer ? De plus, le fait de la promouvoir fait courir un risque aux managers incompétents qui s’y opposeront.

La chance des talents c’est qu’ils valent, en temps normal, quelque chose sur le marché de l’emploi ; à contrario les managers incompétents ont beaucoup de mal à sortir de l’entreprise. C’est donc un processus vicieux qui entraine ces sociétés dans une inexorable fuite des talents formés et dans le même temps, à une sédimentation hiérarchique des mauvais managers.

Ce type d’entreprise ou de départements de grande société continue pourtant d’exister, faute d’un marché de l’emploi efficient et de hiérarchies capables de se réformer elles-mêmes.

Quelles solutions pour les sociétés ?

Si tant est que vous êtes conscients de cet enjeu et que vous avez les moyens d’agir, trois étapes essentielles s’offrent à vous:

  • Identifiez le problème : méfiez-vous d’une hiérarchie qui n’évolue pas assez et écoutez la base. Les employés les plus proches du terrain connaissent toutes les forces et faiblesses de votre société et ne participent pas aux jeux de pouvoir hiérarchique. Libérez la parole, identifiez les potentiels et cernez les problèmes. De la pertinence du diagnostique dépend l’efficacité des actions correctrices.
  • Challengez vos organisations : Les entreprises qui réussissent sont agiles. A l’image des startups, elles s’adaptent rapidement aux enjeux d’un monde en pleine mutation. Or les décisions prisent par une hiérarchie inefficiente nuisent à la compétitive de votre société. Songez, par exemple, à l’initiative du Shadow Comex mis en place par le groupe Accorhotels ou à Apple qui fait évaluer systématiquement ses équipes. Osez changer la forme de votre organigramme et faites confiance à vos jeunes talents.
  • Accompagnez le changement : Il est temps de mettre en place une vraie politique RH. Renforcez le contrôle du département de gestion des ressources humaines sur la hiérarchie – non sans vous être assurés au préalable que ses priorités sont les votre. Garantissez à vos talents une mobilité interne, valorisez les leaders qui développent vos équipes et formez les mauvais managers pour qu’ils gagnent en compétences ou faites intervenir des coachs externes. Généralisez le mentoring et les outils de développement personnel.

« Tout le monde croit que le fruit est l’essentiel de l’arbre quand, en réalité, c’est la graine » – Friedrich Nietzsche

L’avenir des talents et des sociétés est intimement lié. Mais à l’heure actuelle, la conjoncture et les tensions sur le marché de l’emploi figent les organisations et renforcent les pressions sur les équipes. L’économie étant ce qu’elle est, il est temps de traiter ce sujet à bras-le-corps pour éviter aux talents de massivement s’essouffler et aux organisations de s’enfoncer dans une médiocrité certaine.

 
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